Louise Desrenards on Mon, 5 Jul 2004 19:00:28 +0200 (CEST) |
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[nettime-fr] Battisti ; dossier récapitulatif et pour mémoire |
En souhaitant une prochaine déclaration du Soutien avant le 14 juillet, merci de faire suivre le tout ou parties, mais avec tous les liens. Battisti, pourvoi en cassation : rendez-vous le 19 septembre 2004. A-p-p-e-l à l-'-A-r-t e-t à l-a C-u-l-t-u-r-e ! " Libération, 2 juillet. Quotidienne La compagnie des loups Par Pierre MARCELLE vendredi 02 juillet 2004 Alors, les gars et les filles aussi, s'il en est (et forcément, il en est, puisqu'il y en a bien qui torturent) ça fait quoi ? Ça fait comment, le bruit métallique de la sentence secrètement désirée et susceptible d'envoyer, après vingt ans d'exil, un homme croupir derrière les hauts murs le reste de son âge ? Ça fait comment de se découvrir dans le camp de ceux qui, comme on fait à l'écart son petit pipi, rédigent pour des gazettes policières d'indigents et délateurs réquisitoires dont seule la répétitive mécanique fait poids ? Ça fait comment de découvrir, avec quelque chose au fond de soi qui n'aurait jamais cru ça de soi, que la justice, c'est bien, mais le talion, ma foi?... Ça fait comment de se raconter, pour pouvoir encore se regarder dans la glace en se brossant consciencieusement des dents de lait de loup, que certes, l'amnistie, l'oubli et la paix civile sont belles et bonnes choses, mais que ce serait quand même un peu trop facile?... Ça fait quoi, de se faire taper sur le ventre par Roberto Castelli, membre d'une Ligue du Nord un peu néofasciste sur les bords du programme, et ministre italien de la Justice celui-là même qui arrange les petites affaires crapuleuses de Silvio Berlusconi et qui évoquait mercredi une «énorme victoire» ? Est-ce que ça secoue un peu, de se retrouver dans le camp de la peine de mort («Tout de suite, les grands mots !»), ou pas du tout («Tout de même, tu exagères !»)? Ça fait quoi, de ne s'être de sa vie jamais préoccupé des victimes présumées d'un ex-activiste italien devenu concierge parisien, et de soudain ne plus s'obséder que de leur vengeance ? Est-ce une question d'honneur, ou un désir d'honorabilité ? Est-ce que ça chatouille, l'empathie avec la bien-pensance, ou est-ce que ça gratouille, la compagnie des balances ? Avoir au moins une fois dans sa vie hurlé avec le plus grand nombre, est-ce que ça fait bander ? Et être en passe d'obtenir, avec son extradition, la réclusion à vie de Cesare Battisti, ça fait jouir ? Dites-moi. Ça m'intéresse. http://www.liberation.fr/page.php?Article=220664 © Libération " Merci à Pierre Marcelle Exergue Quant à l'accusé, une chose est certaine : aucune lutte armée révolutionnaire ne fut innocente. Jamais Battisti n'a dit qu'il était un innocent, mieux, il a tissé son oeuvre de ses responsabilités civiques actuelles face à son passé. Quant aux soutiens : on n'a pas mis au banc de la société Germaine Tillon ni Henri Jeanson après leur soutien radical au FLN pendant la guerre d'Algérie. Quant à la littérature : Jean Genet ne fut-il pas un voyou et en quoi il édifia partie de sa littérature en ayant connu plusieurs fois la prison. Etc. " A la question toujours posée "Pourquoi écrivez-vous ?", la réponse du Poète sera toujours la plus brève "Pour mieux vivre"." " On ne fréquente pas sans s'infecter la couche du divin." Saint John Perse Hélas, même les détracteurs de Cesare Battisti ne pourront pas rêver ! Battisti face au couchant de la société qui le juge : ni le président de la république, ni son ministre ni les juges, sauf des baudruches ou des déserteurs, ne se seraient donc illustrés, sinon notoirement par leur absence de décision - car "avis favorable" ne veut pas dire "nous décidons l'extradition" : souvenons-nous du 30 juin 2004. Tous fuient publiquement leurs responsabilités à l'horizon européen des accords de Schengen et leur suite (cités dans les attendus), alors qu'aucune instance de justice suprême n'en a jamais émergé, et à laquelle pourraient donc être renvoyées les affaires déclarées hors compétence des tribunaux locaux, telle celle de Battisti, désignée se situer ailleurs par la voix même du juge débitant sa lithanie à toute vitesse, cyniquement plus qu'honteusement, ce 30 juin au palais de justice, Paris - j'y étais, j'ai entendu. Quelles responsabilités se cachent derrière tant d'irresponsabilité autoritaire exhibée ? Non la séparation mais la division Schengen, les affaires de l'Italie, et pour la France : la séparation des pouvoirs ; la pression immédiate et ahistorique du gouvernement est prise en compte comme raison d'Etat ; par contre l'histoire qui inscrit le sens consitutionnel de la cour - l'histoire symbolique de la France qui s'est donné ses lois et cette justice là, pas d'autres, histoire sans exclusive qui contient aussi bien la convention Mitterand avec les réfugiés, entérinée par la succession du pouvoir politique de toutes tendances, comme celle de la justice libre qui accompagna antérieurement ces décisions - est récusée, de sorte que la séparation des pouvoirs prend soudain forme de négation du consensus territorial, non plus de séparation mais de division civique, de rupture gravissime du pacte civique, au sein même de la loi républicaine. Une sorte de coup d'Etat en réalité, sous l'affaire des réfugiés italiens ? S'agirait-il de transformer en juridiction d'exception les tribunaux de l'ordinaire, par défaut de compétence, par délocalisation ? La forme même d'un nouveau fascisme ? Comment imaginer, à la lueur d'un tel exode des responsabilités symboliques et de leurs contradictions et renvois entre toutes les instances de décision et de pouvoir, que la grâce présidentielle pourrait encore se considérer d'elle-même en digne qualité d'être requise - puisque le pacte présidentiel républicain vient d'être dissous par les juges à l'horizon d'une Europe démocratique annoncée - toujours inexistante et incertaine en même temps qu'elle est invoquée !? Pour qui nous prend-on ? Même quand la mobilisation ne résoud rien à l'évidence elle protège du pire Kurtz : on a bien vu en quoi la mobilisation formidable pour Kurtz et le CAE aux Etats-Unis a fait reculer le Grand Jury, pourtant, ils n'en sortiront pas totalement sans objet de délit, ce qui signifie un statut différent de leur citoyenneté désormais avec casier. Et rien de ce qui se passe dans les prisons américaines depuis le 11 septembre n'est effacé. Mieux, aujourd'hui le pouvoir de la communication électorale autour de Bush récupère à propos du CAE ce qu'il attribue à une bavure des Fédéraux dans une mauvaise interprétation du Patriot Act, pour diffuser largement le moyen de protester en cas d'erreur ou de contestation : en donnant son nom son adresse de bon citoyen lésé pour recourir à l'Etat central, réclamation des citoyens critiques se mettant en fiches autoconsenties ! Mieux que la délation : l'auto-livraison imprescritpible vers d'autres occurences... on sait d'autre part que sont considérés comme terroristes potentiels ceux qui ont éprouvé des difficultés avec leurs cartes de crédit. Dans nos meilleures maternités, ici, la trace génétique des bébés est relevée à la naissance sous couvert de médecine préventive, sans que la réflexion nécessaire pour en apprécier l'impact n'ait été procurée aux mères avant même qu'elles aient accouché. "Tu as accouché hier, tu n'as pas dormi entre les pleurs de ton bébé et ceux du bébé de ta voisine de chambre, tu paniques parce que tu ne sais comment le calmer, le lait ne vient pas (faut-il donner le sein - en serais-je capable ? - ou alors opter pour le biberon secourable - dois-je résister - ?) tu ne dormiras pas normalement avant une semaine, mais tu as deux jours pour signer à partir d'aujourd'hui et ce sera en toute connaissance de cause." Impeccable. Saint John Perse : même un politique avisé put se tromper, avoir mal agi, puis le dire Toute proportion gardée, je me souviens, à savoir rien de moins grave peut-être mais du moins situant un cas particulier, prédiction concommittente avec les tendances actuelles de la guerre ordinaire des Supra-Etats, globalement contre leurs peuples et sur tous les fronts - à l'instar de 1984 et de Ubik réalisés - ; en place de l'Histoire moderne qui connaissait encore seulement la lutte des classes ou la guerre entre les Etats ou entre les clans, je me souviens d'avoir entendu, il y a une vingtaine d'années (pardon de l'affront), une interview d'archives radiophonique ou télévisuelle du grand poète Saint John Perse (Alexis Léger) ; il évoquait l'aéroport du Bourget au retour de Munich en 1938, où pacifiste influent en tant que secrétaire du ministère des affaires étrangères il avait accompagné Daladier pour l'édifier, lorsqu'ils furent accueillis au cri de la foule : "Ils ont sauvé la France !" On a vu la suite et Saint John Perse partit vivre en exil aux Etats-Unis... Au moins Daladier savait-il avant tout le monde, dès les accords pris sous la diligence de Mussolini avec le gouvernement nazi, que non seulement ils avaient bradé la Tchécoslovaquie pour arranger leur propre marché, mais sachant qu'en cela ils avaient vendu bien plus qui ne pourrait être sauvé, bien au contraire, et même dit-on avoir entendu Daladier se lamenter avant de quitter l'avion à l'arrivée : "Les malheureux ! Les malheureux ! S'ils savaient ce qui les attend ! " Qui protesta malgré la belle unité chorale entre les staliniens et la droite, alors que le pacte-germano-soviétique n'était pas encore signé (1939) ? Les journalistes de "Ce soir", le journal communiste du soir créé en 1937 par Paul Nizan, Gabriel Péri, Aragon ? Le jeune poète et homme de lettres Aragon : mais son article fut censuré. Voici pour vous en redire sur ce qui n'est pas crédible dans l'attitude publique de la gauche italienne actuelle, en 2004. Mais ce n'est pas notre problème, comme a dit Bedos en effet, et voici pourquoi... Battisti : un signe médiatique pour désigner une cible politique Battisti est un signe bien après lui, quand le monde encore une fois change autrement qu'il n'y paraît. Les sudètes pour la plupart étaient allemands comme Battisti est italien, c'est à dire que Battisti aujourd'hui est assimilable à la France comme les sudètes alors l'étaient à la Tchécoslovaquie ; je le dis en pesant mes mots et avec tout ce qu'implique une telle métaphore : par l'entrée du nazisme autorisé en région Sudète, l'entrée non autorisée en Tchécoslovaquie a suivi, puis le reste de l'Europe fut occupé. Ainsi va l'ingérence des Etats et du pouvoir, par pression serait-elle suivie de surprenante disparition, dissolvant les pactes civiques et livrant les citoyens à tous les dangers... L'Italie n'a jamais été indépendante des Etats-Unis depuis la dernière guerre mondiale. Fini, à distance passagère de Berlusconi, a été personnellement reçu au Pentagone par Rumsfeld il y a plus d'un mois. Maintenant, le CIA-Pentagone et l'Angleterre nous redonnent de la menace terroriste Al Qaeda - capable d'être suivie d'effets, on l'a vu en Espagne... Heureusement, nous savons que les espagnols ont su dire "non" à la pression de l'ingérence. Ce n'est pas en nous divisant sur Battisti que nous pourrons faire face à ce qui nous attend, bien au contraire car les puissances étrangères de l'ingérence ont fait de la communication de Battisti un signe associé à la réalisation du contrôle et de la sécurité. Maintenant, rester aussi fermes sur l'écrivain Battisti, ancien militant de la lutte armée, que les Espagnols le furent sur les autonomistes Basques après les attentats de Madrid, est désormais incontournable. Du moins en termes d'opinion critique, tant que nous serons gouvernés par une chambre qui ne correspond plus à l'actualité de la mobilisation électorale, avec un pouvoir faisant ressortir ses séparations comme une division civique, comme une fracture sociale. Telle est la barre des enjeux d'un pays sous influence et à dominante autoritaire irresponsable, si nous flanchons. Que faire ? Sur un premier tour qui ne dit pas notre dernier mot, pendant que ladite et déjà citée fracture s'accentue gravement entre les français dont les opinions s'avèrent de plus en plus irréconciliables, manipulés et désinformés autant par les cours au collège quand ils sont jeunes que par les marchands d'armes et leurs lecteurs interactifs, quand ils sont vieux, ou rumoristes solidaires entre deux âges : quoique de ceux-là nous résistons à plusieurs pour ne pas être décérébrés. Nous avons déjà compris, à avoir suivi l'affaire depuis l'hiver dernier et observé le cours de l'Etat Italien dans l'Etat français, étayé par la presse, tandis qu'il exerçait une pression sur la justice déniant les accords Mitterrand, et pour ce faire au nom de la séparation des pouvoirs en France, que contradictoirement les juges se soumirent néanmoins à la pression de la chancellerie en adoptant la voix du procureur, pour énoncer la sentence. Oui, nous avons déjà compris que le jugement en tous ses attendus du 30 juin pouvait être rendu depuis au moins l'instruction précédente, or il ne le fut pas ; peur des remous avant les départs en vacances ? Nous en concluons l'ingérence du pouvoir dans la justice et la mauvaise conscience de la justice, et encore ceci : où Battisti sera renvoyé en Italie sans amnistie, ici les choses iront de mal en pis. Mesdames et messieurs les juges : connaissiez-vous si mal votre droit, ou en amateurs, qu'au terme de deux saisons de procédure ouvrable, alors que dès la dernière instruction vous teniez déjà depuis un mois les dernières pièces remises par le gouvernement de l'Italie, et la défense venant de vous édifier publiquement pour vous avertir de ce qu'elle en pensait, vous n'ayez pu prendre votre décision ? Pourquoi nous l'avez vous jetée à la figure in fine, juste avant votre congé annuel ? En confortant les pressions publiques du ministre de la justice avant les dernières Régionales, les juges à eux seuls viendraient donc solder clairement les libertés et la tolérance de l'altérité : ceci est la négation même du pacte de la citoyenneté constitutionnellement acquise en France, depuis la fin de la guerre d'Algérie, alors que rien n'avait proclamé officiellement une telle rupture symbolique avant les attendus du procès Battisti, le 30 juin. Maintenant le droit ne "vaut" plus rien, tant on l'a vu et entendu se retourner comme une crêpe lors des différents épisodes de l'instruction, entre le procureur et les avocats, et les remises calendaires des décisions des juges ?! on le renverse comme on veut à la lettre, tandis que la raison d'Etat personnalisée pousse les juges dans le dos, auprès desquels il suffit d'insister pour obtenir satisfaction pourvu qu'ils puissent en dire la sanction en toute ironie ? Invocation Heureusement, nous connaissons encore nos propres devoirs de citoyens dont la patience, sachant aussi que la répétition, dans le domaine de l'éducation, est mère de la certitude. Nous répéterons donc inlassablement notre soutien - cette incantation. Nous sommes devenus nombreux et divers, et le serons de plus en plus, parce qu'en de tels aveuglements roule la boule de neige de la solidarité qui grandit, tandis que vos pierres lancées pour protéger votre fuite, feraient-elles mal, n'amassent mousse. Nous appelons à l'aide, accroissant notre nombre comme neige qui déboule. Un rien nous arrêtera : que la paix revienne pour ceux qui ont tenu leurs engagements si vous tenez les vôtres, ceux pour lesquels vous ne représentez pas que la raison d'Etat mais aussi celle du peuple hautement, quant il ne donne pas voix de populisme. Nous irons jusqu'à l'Europe forts de plusieurs dizaine de milliers de signatures, s'il le faut, cela devrait-il être la honte du gouvernement français s'il ne prenait pas ses responsabilités ultimes de grâce, ou si l'Italie ne proclamait pas l'amnistie générale avant les ruptures humaine et sociale prédictibles ici ou là. Car le cas Battisti tout renvoyé à l'Italie qu'il voudrait être, aujourd'hui n'est qu'une émergence des erreurs qui soulèvent d'incontournables réalités critiques ici. Quelle démocratie de droit pourrait prétendre installer son avenir sur le nombre inouï de prisonniers politiques peuplant les geôles italiennes aujourd'hui, et tel Baal en réclamant d'autres ? Quelle république pourrait prétendre avoir contribué de fonder une Europe solidaire libre et pleine d'avenir, sur la base de telles alliances ? Nous ne voulons pas voir l'Europe en crise civique : c'est maintenant ou jamais qu'il faut la dépasser par une politique intelligente de l'innovation de la citoyenneté européenne, dans la confiance du dynamisme critique qui effectue le principe vital positif du bonheur de vivre ensemble dans la différence, sans exclusion. Toujours signer la pétition http://www.mauvaisgenres.com/peti/index.php Bonnes vacances en Ile de France, Cesare Battisti, parmi les quelques autres écrivains, cinéastes ou artistes probablement qui eux aussi ne partiront pas ;-) L.D. PS/ Citation de la liste cesareinfos Paris, le 1er juillet 2004 Chers amis, Je souhaite aujourd'hui vous exprimer à tous mes plus sincères remerciements pour le combat que vous avez mené et que vous continuez à mener, pour votre soutien qui n'a jamais fait défaut malgré les revers que nous avons connu. Vous avez toujours été à mes côtés durant ces derniers mois. C'est grâce à vous que, partout en France et en Europe, il a été possible d'entendre dans la tempête une autre voix, forte et sereine. Votre présence indeffectible me va droit au coeur et me donne la force, dans ces moments difficiles, de continuer à tenir le coup et d'espérer. Je vous embrasse. Cesare ------------------- Toutes les infos http://www.vialibre5.com Les ouvrages de Battisti (Fnac Fr) http://www3.fnac.com/item/author.do?SID=abce347b-3c2e-2a50-455f-a740cb0e8068&TTL=120520041525&Origin=FnacAff&category=book&UID=0c011073d-4303-015d-a5c0-29854ddd4d38&id=68359 -------------------- L'opinion sur Battisti est une opinion politique : En effet, l'argumentation de la culpabilité et de la justice ne tient pas, s'agissant d'une énigme définitive : ceux qui le pensent coupables s'appuient sur une accusation sans preuve, sinon les témoignages des repentis parmi lesquels l'ancien chef des PAC qui ne saurait avoir été étranger aux ordres puisque c'était lui qui les donnait ; donner l'ordre de meurtre sans en avoir commis soi-même n'est pas de mise chez les voyous - puisque les medias définissent ainsi les PAC. Ces repentis peuvent aussi bien être les ou des assassins véritables, et d'ailleurs avant leurs déclarations contre Battisti, ils étaient présumés comme tels. Dire que Battisti serait un assassin en liberté revient à dénier l'erreur judiciaire possible, au nom d'une sécurité et d'une sanction qui n'ont pas cours devant la réalité d'assassins repentis possibles, libres sans conteste. Si de possibles assassins en liberté ne menacent pas la sécurité publique pourvu qu'ils soient repentis, c'est dire à ceux qui, au contraire, soupçonneraient Battisti, comme son parcours exemplaire en France le place dans une situation sans danger pour l'environnement : il ne s'est pas comporté comme un assisté aux dépens du peuple français mais a assumé son autonomie économique à travers le gardiennage d'un immeuble, accru de la production sans relâche d'une oeuvre littéraire ; il a eu des enfants ; sans renouer avec l'activisme, comme cela lui avait été demandé, il a néanmoins assumé son passé par la catharsis de son oeuvre, et en a fait la communication et la transmission critiques parmi le public et les élèves ; enfin, il a eu un comportement éthique irréprochable par rapport à ses anciens camarades et furent-ils des repentis : en ne désignant personne pour détourner de lui les accusations, ce qu'à l'inverse ont fait ses anciens amis. Le parcours de Battisti en France est sans faute. Si ce parcours sans faute n'est pas identifié, c'est que l'opinion à son encontre engage des projections personnelles et des points de vues politiques qui valorisent plutôt les repentis que leurs accusés, mais en aucun cas la vérité puisqu'elle n'existe ni ne pourra jamais exister vu les faits. Ceci, et de toutes façons à ne pas compter les morts des deux côtés, car les années de plomb ont été cadrées par les attentats criminels de masse faits par le pouvoir séditieux allié aux fascistes et la droite de la démocratie chrétienne de la loge P2, dans le cadre financier et stratégique des services secrets Gladio dirigés par les Etats-Unis sous l'OTAN, alors que nous-mêmes en étions sortis, en pleine guerre froide, non par les activistes de gauche qui y répliquèrent par la lutte armée révolutionnaire : entre 1969 - attentat de la banque de l'Agriculture à Milan, et 1979, attentat de la gare de Bologne. Ceci, pour ne citer que les principaux actes déjà graciés aujourd'hui, tandis que l'amnistie n'est toujours pas proclamée en Italie, vingt ans plus tard. Si Aldo Moro, qui voulait faire l'alliance historique avec les communistes, a été enlevé par des Brigadistes dans un appartement des services secrets italiens, c'est invité par le chef des services secrets présent au moment de l'enlèvement. Nous avons connu des crimes collatéraux pour lesquels il y avait eu des peines prononcées et des emprisonnements pendant la guerre d'Algérie : à l'issue de la guerre, l'amnistie fut générale pour rétablir la paix civile. Pour mémoire, je cite Carlo Roccella : " (...) mais sait-on ce que c'est, dans un pays que le rituel du vote permet d'appeler démocratique, une police et une armée qui ont ensanglanté les rues et les places où les jeunes et les travailleurs cherchaient à crier leur faim de justice ? Enfin, on parle de terrorisme, mais que vous disent ces noms, ces dates, ces chiffres, ces bombes : 12 décembre '69 Piazza Fontana 16 morts, 88 blessés ; 2 juillet '70 train Freccia del Sud 9 morts 139 blessés ; 25 septembre '70 assassinat de cinq anarchistes calabrais ; 28 mai '74 Piazza della Loggia Brescia 8morts 94 blessés; 4 août '74 train Italicus 12 morts 105 blessés; 2 août '80 gare de Bologna 85 morts 200 blessés, bombes explosées toujours pendant des périodes de forte mobilisations populaire. Sans compter les dizaines de jeunes militants tués par les fascistes et la police pendant les manifestations, du Nord au Sud. Je ne veux pas renvoyer dos à dos les morts des uns et les morts des autres ; laissons les martyrs aux généraux et aux prédicateurs. Les victimes du régime démocrate chrétien et de ses alliés ne justifient sans doute pas le développement d'un contre-feu armé et clandestin, mais elles aident sans doute à le comprendre. Ce dernier, par ailleurs, ne fut pas le fait d'un groupe d'activistes isolés. Il naissait, il baignait dans un fort mouvement social, riche d'utopie et de révolte créatrice : non pas une avant-garde Quartier Latin, mais un vaste carnaval de l'esprit où les jeunes ouvriers, les chômeurs, les étudiants, les féministes, par centaines de milliers ont construit, pendant dix années le seul rayon d'espoir qu'il ait été donné de vivre pendant ces années plombées par l'arrogance du pouvoir. C'est notre histoire, l'histoire d'une génération qui, entre contradictions et illusions, verbiages révolutionnaires et désespoir a fini par accoucher, entre autres choses, de l'impasse politique et morale qu'a été la lutte armée. Mais c'est aussi l'histoire d'une génération qui a dit "non" et qui a cherché sa dignité jusque dans les coins obscurs où l'on ne se reconnaît plus soi-même. (...) " < n e t t i m e - f r > Liste francophone de politique, art et culture liés au Net Annonces et filtrage collectif de textes. <> Informations sur la liste : http://nettime.samizdat.net <> Archive complèves de la listes : http://amsterdam.nettime.org <> Votre abonnement : http://listes.samizdat.net/wws/info/nettime-fr <> Contact humain : nettime-fr-owner@samizdat.net