Louise Desrenards on Mon, 15 Oct 2012 02:30:05 +0200 (CEST) |
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[Nettime-fr] Du dualissime nobelisiaque à la schyze barrosystique |
Sur la bipolarité du Prix de la Paix 1 Quel est le cursus de l’ascension européenne de monsieur Barroso ? Premier ministre du Portugal depuis mars 2002 jusqu’en juin 2004 : il est alors délié de son mandat national en tant que nouveau Président de la Commission Européenne, choisi lors d’une réunion extraordinaire du Conseil Européen rassemblant tous les chefs d’État soit 25 à l’époque, à l’unanimité du second tour, en toute précipitation juste après les élections européennes. Serait-ce pour le blanchir contre une attaque nationale sur ses bonnes relations avec M. Aznar depuis la déclaration de guerre à l’Irak, alors que ce dernier vient d’être démasqué en Espagne comme manipulateur au moins de l’information sur les attentats du 11 mars 2004 à Madrid, pour les faire attribuer à l’ETA, afin de justifier un coup de force contre les élections espagnoles du 14 mars, en faisant proclamer l’état d’urgence ? En tous cas sa nomination fortement soutenue par Tony Blair tend à signifier les intérêts atlantiques qu’il représente, quand de plus la guerre d’Irak n’est pas forclose. Puis en 2007 il est renouvelé durablement à ce poste devenu supra-légal par le Traité signé en toute logique à Lisbonne, le 13 décembre de la même année, en présence de et contre-signé par Barack Obama — ce qui n’atteste pas de l’indépendance de l’Europe. Malgré les contestations massives dans son pays, M. Barroso Premier Ministre avait imposé l'engagement du Portugal dans la guerre d’Irak et notamment organisé aux Açores la rencontre au sommet entre les trois protagonistes majeurs de cette guerre, considérés depuis comme des criminels de guerre restés impunis : George W. Bush, Tony Blair, José Maria Aznar. Une photo de ce trio lors de cette tribune les montrant tout à leur joie est depuis devenue célèbre. Le voici accompagnant leur sommet (es.wikipedia) : http://es.wikipedia.org/wiki/Tr%C3%ADo_de_las_Azores Mais en outre, il est soupçonné d’avoir exécuté les pressions du lobby politique et militaire américain contre l’indépendance et l’économie militaires européennes, afin de supprimer toute issue de Défense de l’Europe sinon en l’OTAN, en retirant le Portugal du programme de construction de l’avion militaire européen, Airbus A400M, retrait qui suivi par l’Italie coûta à l’avionneur européen près de 2 milliards d’euros (fr.wikipedia). Non seulement cette décision marqua la fin des prétentions sur une défense autonome de la communauté européenne, mais encore ses effets inaugurèrent la réouverture décomplexée de la production industrielle du gros armement en Allemagne (notamment les sous-marins pouvant être équipés d’ogives nucléaires dernièrement vendus à Israël) : https://fr.wikipedia.org/wiki/Jos%C3%A9_Manuel_Dur%C3%A3o_Barroso Mais l’Europe est radicalement solidaire des engagements respectifs de monsieur Barroso comme un des intermédiaires majeurs de la généralisation européenne de l’OTAN, puisqu’il fut choisi en toute connaissance de cause par 25 chefs d'État puis 27 pour la représenter. Tout cela désigne une Europe fortement compromise dans les affaires militaro-industrielles et leurs marchés, sous le contrôle politique de la plus grande puissance militaire du monde et de ses alliés surarmés outrepassant les frontières de l’Europe jusqu’au Moyen Orient. Ce qui rend en tout et en personne particulièrement grinçante et irrecevable la déclaration de monsieur Barroso saluant une récompense pour la paix attribuée à l’Europe par le Comité Nobel norvégien. - - - - - - - - - - - - - - - - - - - 2 Tariq Amy et moi/toi Voici ce que Tariq Ali a répondu lors de son interview face à Amy Goodman, sur le Prix Nobel attribué à l'EU, il remet en mémoire le plan Marshall pour l'Europe face aux pays du Pacte de Varsovie, et que l'origine de l'UE ce n'est pas la Communauté européenne elle-même telle qu'on la dit, mais ce que les États-Unis et ses alliés de l'OTAN ont tenté d'en faire après la guerre puis au-delà, pour garder l'Europe sous contrôle après la guerre froide. Il passe sur les épisodes historiques de la formation de la communauté européenne avec les protagonistes gaullistes du vivant du général qui dotant le pays d'une force de frappe avait prié les américains de quitter les bases françaises. Mais il a raison, tout ceci ayant été prescrit depuis 1989 (y compris l'arraisonnement du devoir d'insoumission égal à un droit civique fondamental dans la déclaration des droits de l'homme annexés à la cinquième constitution), progressivement et largement prescrit, a donc évolué d'historique en parfaitement anecdotique. Le bouclier anti-missile de missiles aux frontières de l'Europe se poursuit. Ici Paris tout va bien, ambiance de guerre civile : les Roms sont pourchassés et le ministre de l'Intérieur vient de lancer un appel citoyen à dénoncer les islamistes de voisinage. Tariq Ali sur le Nobel de la Paix attribué à l’Union Européenne : http://www.larevuedesressources.org/tariq-ali-sur-le-nobel-de-la-paix-attribue-a-l-union-europeenne,2411.html Tariq Ali: European Union Awarded Nobel Peace Prize Despite Ties to NATO, Crippling Austerity Cuts : http://www.democracynow.org/2012/10/12/european_union_wins_nobel_peace_prize - - - - - - - - - - - - - 3 Sur le dualisme de monsieur Nobel Le dualisme de Alfred Nobel (1833-1896), chimiste devenu richissime grâce à l’invention de la dynamite, ce qui le poussa sans doute à concevoir une dialectique des récompenses entre les innovations scientifiques et du savoir et l’action pour la paix ou les révolutions pacifistes, se retrouve dans la division institutionnelle de son nom devenu un sigle partagé entre deux pays européens. Cette division de la fondation Nobel entre la Suède et la Norvège remonte à leur séparation nationale en 1905, posthume du fondateur. Celui-ci ne connaissant de son vivant qu’une seule nation et une seule monnaie ne pouvait imaginer que la division se poursuivrait au delà de sa propre conscience. Tel est le destin de la fondation Nobel, sanctuaire institutionnel pacifique honorant les morts des guerres nationalistes ou révolutionnaires du siècle de la fondation et du suivant, en plus universel que la basilique du Sacré-Cœur, notre sanctuaire parisien du massacre des communards commémorant la fondation de la 3e république française par ceux-là même qui les exterminèrent, leur prenant au passage quelques expériences généralisables « pour le bien de tous les autres », de l’eau de la laïcité de l’école publique, et de fonder la scolarisation obligatoire sur sa gratuité, par exemple. Mais monsieur Nobel n’était pas lui-même un poseur de dynamite pour autant qu’il l’eut inventée, et elle servit aussi à tracer des routes dans les montagnes, et à ouvrir des voies pour les chemins de fer. Si les Prix Nobel attribués en Suède sont parfois contestés, du moins sont-ils attribués par les académies nationales respectivement concernées dans les disciplines récompensées, et liées au réseau international des académies et à leurs publications, qui assurent l’identification des innovations internationalement reconnues. Ce n’est pas le cas du Nobel de la Paix attribué en réseau fermé, en Norvège, par un jury coopté parmi les aînés du parlement norvégien. Pour mémoire, et c’est tout dire sur l’opportunisme de la récompense pour la paix, le Mahatma Gandhi qu pourtant vécut jusqu’en 1948, demeure un des grands oubliés symptomatiques de l’idéologie traditionnelle du Comité norvégien. Un dernier point est de souligner qu’une discipline majeure est depuis la fondation privée de Nobel : les mathématiques. Étrange discipline de l’abstraction gratuite et pourtant sans laquelle la recherche expérimentale ne pourrait être évaluée ni même paramétrée. Les mathématiciens à la mauvaise langue disent que cette omission voulue par Alfred Nobel serait due à la trahison amoureuse de son épouse avec un mathématicien dont ainsi il aurait voulu se venger de façon durable en même temps que contre la puissance de sa discipline. Certes les grands mathématiciens modernes furent en général des poètes et / ou des activistes et/ ou de grands séducteurs, parfois jusqu’à en perdre la vie. Les Lancelot de madame Nobel, s’il en est une allégorie anachronique possible, en quelque sorte. Ce qui renforce la beauté de la discipline en son absence de toute récompense... mais contradictoirement confère un signe poétique à l’ensemble des lauréats du savoir et des sciences, étant sous-entendue l’éventualité de leur aptitude courtoise sous-jacente. Quant aux lauréats de la Paix, non récompensés pour une production objective, mais pour valoriser la politique, ils n’ont pas la chance d’être situés comme les autres nobelisés dans le rebondissement durable du mythe. Louise D. -- ----- _______________________________________________ Nettime-fr mailing list http://www.nettime.org/cgi-bin/mailman/listinfo/nettime-fr